Mata Hari :la sensualité et l’érotisme ajoutés à l’espionnage durant la Grande Guerre

Un noter un détail intéressant dans cette correspondance, un aspect rarement évoqué, celui de l’espionnage, et des complications qui en découlent dans la vie de tous les jours.
La France semblait un peu retard dans ce domaine durant les premiers mois du conflit. C’est après la bataille de la Marne que le Grand Quartier général, sur ordre du général Joffre, créa le 2e bureau du service de renseignement, fonctionnement conjointement avec le 2e bureau de l’Etat Major des Armées, qui seront rejoints un peu plus tard par un 5e bureau. Ces services collaboraient avec la Sûreté générale, le Ministère de l’intérieur et la Préfecture de Police de Paris. Quand on voit la complexité de ce réseau, on comprend immédiatement la lourdeur de ce service secret « à la française ».
Tous les pays participants au conflit ont eu recours à l’espionnage… rappelons-nous la très célèbre Margaretha Geertruida « Margreet » Zelle MacLeod, alias Mata-Hari, néerlandaise, danseuse « exotique » au service de l’empire allemand ! fusillée le 15 octobre 1917 à Vincennes.
Mata Hari en spectacle vers 1915.
Mata Hari en spectacle vers 1915.

Mata Hari
(* 07. Août 1876; † 15. Octobre 1917)

Margaretha Geertruida ZELLE est l’unique fille de Adam Zelle et de Antje van der Meulen. Son père, riche fabricant de chapeaux et de capes, lui porte une attention toute particulière. La petite fille, souvent prise pour une eurasienne en raison de son teint mat, montre un penchant précoce pour l’affabulation et la mise en scène. Le « cocon » familial se trouve brisé en janvier 1889 lorsque l’entreprise Zelle fait faillite. La famille déménage, Adam Zelle délaisse ses enfants, le couple se sépare le 4 septembre 1890. Le décès de Mme Zelle huit mois plus tard disperse la fratrie.

 

 

 

 

 

 

 


Mata Hari vers1907.
Mata Hari vers1907.

Biographie

En novembre 1892, Margaretha entre à l’école normale de Leiden, dont elle est renvoyée en raison d’une liaison avec le directeur. Elle va alors vivre chez un oncle à La Hague. En mars 1895 elle répond à une annonce matrimoniale d’un capitaine de vaisseau de l’armée royale des Indes : « Officier de retour des Indes cherche jeune femme affectueuse pour mariage ». Ce dernier, de dix-neuf ans son aîné, se nomme Rodolphe Mac Leod, alias John. Il représente l’autorité paternelle qui lui a fait défaut. Le 11 juillet, leur union est officialisée. Le 30 janvier 1897, résidant alors à Amsterdam chez une s¿ur de Rodolphe, le couple a son premier enfant, Norman John.

Au début du mois de mai 1897, la famille s’embarque pour Toempong (à l’ouest de Java), aux Indes néerlandaises, où l’officier Mac Leod doit rejoindre son poste. Les époux y ont une fille, Jeanne Louise dite « Non ». La jeune femme s’intéresse aux danses balinaises et prend le pseudonyme de Mata Hari « ¿il du jour » (nom du Soleil en Indonésie). Cependant, la vie conjugale sur place devient difficile. Margareth, grisée par les colonies, délaisse sa famille. Le couple se dispute sur fond d’adultère. Leur fils meurt à la suite d’une intoxication. En 1900, après vingt-huit ans de service, Rodolphe Mac Leod quitte l’armée.

Mata Hari en 1904...photo prise après un spectacle.
Mata Hari en 1904…photo prise après un spectacle.

En mars 1902, les Mac Leod retournent aux Pays-Bas et divorcent cinq mois plus tard. En dépit du jugement rendu, Rodolphe refuse son droit de visite mensuel, et soustrait l’enfant à la garde de sa mère.

En 1903, âgée de 26 ans, la Hollandaise vient à Paris. Sans emploi, elle regagne les Pays-Bas pour quelques mois avant d’entamer dans la ville éternelle une carrière de danseuse de charme sous les apparences d’une princesse javanaise dénommée « Lady Mac Leod ». Elle débute au salon de Madame Kiréesky, puis, de salons privés en salons privés, sous son pseudonyme javanais de « Mata Hari », finit par se faire inviter par Monsieur Guimet, possesseur d’une salle de spectacle privée. Sa représentation le soir du 13 mai 1905 en princesse indienne totalement nue marque le début de sa vie mondaine.

Photo prise en 1905 lors de sa représentation totalement nue.Cette représentation lui apportera un succès fantastique...auprès de l'élite polotique et financière de l'époque.Seulement cette photo se vendra fort cher ...sous le manteau.En s'influenceant de la culture orientale,elle réinvente le streap tease .Avec elle,le corps de la femme devient une oeuvre d'art.
Photo prise en 1905 lors de sa représentation totalement nue.Cette représentation lui apportera un succès fantastique…auprès de l’élite polotique et financière de l’époque.Seulement cette photo se vendra fort cher …sous le manteau.En s’influenceant de la culture orientale,elle réinvente le streap tease .Avec elle,le corps de la femme devient une oeuvre d’art.

Elle y interprète avec d’autres artistes une variation d’une « danse hindoue » en l’honneur de la déesse Shiva. Le spectacle est un succès et comédiens sont invités à se produire devant les grands de l’époque : le 18 août 1905 à l’Olympia de Paris, en janvier 1906 à Madrid ; à Monte Carlo elle joue dans Le Roi de Lahore de Jules Massenet (1842-1912) ; à Berlin, à La Haye, à Vienne et au Caire.

Dans son interprétation de la déessse Shiva,elle aurait commencer par se dévêtir par ...le bas,contrairement aux habitudfes ancrées des spectacles de strip-tease,.
Dans son interprétation de la déesse Shiva,elle aurait commencer par se dévêtir par …le bas,contrairement aux habitudes ancrées des spectacles de strip-tease,.
 
...sous des vêtements transparents,on devine son corps.
…sous des vêtements transparents,on devine son corps.

Ses talents artistiques sont toutefois à nuancer. Mata Hari a probablement inventé un type de chorégraphie appréciée dans les cabarets et les cercles pour qui l’exotisme est synonyme de lascivité, plus qu’elle n’a présenté de danses indiennes. Aux journalistes, l’interprète cède le pas à la comédienne : elle aime à présenter sa mère comme une princesse indienne, élève son père à la dignité de baron et ajoute : « je suis née à Java, au milieu de la végétation tropicale, et, depuis ma plus petite enfance, des prêtres m’ont initiée à la signification profonde de ces danses qui constituent un véritable culte. » Ceci ne l’empêche pas, dès 1907, d’être éclipsée par les autres danseuses de charme, comme Colette, remplacées par les ballets russes quelques temps après. Mata Hari, voyant sa notoriété diminuer, finit par mener une vie mondaine, collectionnant les bienfaiteurs, toujours en quête de nouveaux amants.

Lors de la déclaration de guerre, Margaretha Zelle vit à Berlin auprès d’un ancien galant, Alfred Kiepert, hussard, en attendant de se produire au Metropol.

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Ses compétences linguistiques lui permettent de regagner les Pays-Bas puis de s’établir à Paris où, installée au Grand Hôtel, elle continue à vivre de ses charmes. Au début de l’année 1916, lors d’un voyage en Allemagne (Cologne, Francfort), Mata Hari, endettée par son train de vie, est contactée par Cramer, consul allemand à La Haye. Celui-ci lui propose de régler ses dettes, de donner 20 000 couronnes en échange de renseignements sur la France. Elle devient ainsi l’agent H 21.

De retour à Paris en juillet, elle noue des contacts avec les officiers alliés, et s’éprend d’un jeune capitaine de l’armée russe. Ce dernier, blessé, est soigné à Vittel.

 

Mata Hari intrigue alors pour obtenir l’autorisation de se rendre à ses côtés. Elle entre alors en relation avec le capitaine Ladoux, officier du contre-espionnage français. En contre partie de cette faveur et d’un million de francs (jamais versés), il lui propose d’espionner le Kronprinz, un de ses anciens amants. Le Français se méfie d’elle : il la fait surveiller pendant toute la mission. Son travail achevé, Mata Hari est envoyée, au mois d’août, en Belgique puis au mois de novembre en Espagne, centre de la guerre secrète, sans argent ni directive précise. Les services secrets britanniques, croyant avoir affaire à l’espionne Klara Benedix, la mettent aux arrêts à l’escale de Falmouth et la soumettent à un interrogatoire serré alors qu’elle se rend aux Pays-Bas afin de gagner l’Allemagne. Le capitaine Ladoux télégraphie à son homologue, Sir Basil Thomson, afin de lever le doute.
L'espionne profiteuse et agente H21 pour l'empire allemand.
L’espionne profiteuse et agente H21 pour l’empire allemand.

Libérée, Mata Hari retourne à Madrid, le 11 décembre 1916, pour trois semaines. Elle noue des contacts avec l’attaché militaire de l’ambassade d’Allemagne, Arnold von Kalle, et communique aux services français une liste d’agents, un procédé d’encre sympathique et un lieu de débarquement au Maroc  cette « moisson » d’informations profite en réalité à Denvignes, en charge des communications, qui s’en attribue le travail. Entre-temps les services britanniques interceptent et déchiffrent les câbles de l’attaché allemand à Berlin. Ils confondent les identités de l’agent H 21 et de Mata Hari (en raison du manque de vigilance du lieutenant von Kroon), et obtiennent ainsi la preuve qu’elle est un agent double. Un des messages, consacré à la mise en place sur le trône de Grèce du prince héritier Georges mentionne que « l’agent H-21 s’était rendu utile ». Une autre lecture des faits veut que von Kalle, se méfiant de Mata Hari, ait provoqué lui-même l’enquête en envoyant ces messages radio à Berlin dans un code facilement déchiffrable par les alliés.

Elle revient à Paris en janvier 1917 afin de retrouver son amant, avec l’espoir de d’une récompense et d’une nouvelle mission. Elle est arrêtée le 13 février à l’hôtel élysée Palace par le capitaine Bouchardon, le magistrat instructeur, « prévenue d’espionnage et de complicité d’intelligence avec l’ennemi, dans le but de favoriser ses entreprises ».

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Photo prise quelques minutes après son arrestation.

 

Photos prises lors de son arrestation pour espionnage.
Photos prises,en 1917, lors de son arrestation pour espionnage.

Elle est enfermée à la prison pour femmes de Saint-Lazarre. Pendant quatre mois, au gré de quatorze interrogatoires (du 23 février au 21 juin), Bouchardon finit par la confonde comme étant l’agent H 21 – cette dernière nie cependant avoir entretenu des relations avec le chef du renseignement allemand à Madrid, même si elle admet avoir reçu de l’argent du consul allemand Cramer dans le cadre de sa vie mondaine. Entraîné par le chauvinisme ambiant, Bouchardon ne prend pas en compte les services rendus par l’accusée . Aussi,il n’y croit pas d’ailleurs : « féline, souple, artificieuse, sans scrupules, sans pitié, elle était une espionne-née », écrit-il dans ses mémoires.

Le procès, à huis clos, commence le 24 juillet 1917, devant le 3e conseil militaire au Palais de justice de Paris. La Cour est présidée par le lieutenant-colonel Somprou et le commissaire du gouvernement, le lieutenant Mornet – lequel déclare plusieurs années après le procès : « il n’y avait pas de quoi fouetter un chat. » Son avocat, Maître Clunet, un ancien amant, est un expert réputé du droit international.

Hormis Jules Cambon, Vadim Maslov, et le diplomate Henri de Marguérie qui déclare n’avoir jamais abordé de sujet militaire en sa présence et pouvoir se porter garant de sa parfaite probité, aucun de ses anciens amants n’accepte de témoigner en sa faveur. Le procès, comme l’interrogatoire d’ailleurs, ne font pas la départie entre sa vie mondaine jugée immorale, son cosmopolitisme suspect, et ses activités de renseignement.

Ils ne sont que le reflet d’une opinion publique française et alliée qui réclame des coupables pour les morts, les mutineries et autres maux de la guerre.

A l’arrière, les ligues relayées par la presse entretiennent l’idée du complot ennemi, attisent la traque aux collaborateurs de tous bords. Margueritte Francillard est la première française fusillée pour espionnage le 10 janvier 1917. Mlle Dufays connaît le même sort au mois de mars. L’affaire Mata Hari, personnage au comportement pour le moins ambigu, est une occasion de plus pour renforcer la cohésion nationale. Les archives britanniques montrent par ailleurs qu’elle n’a pas livré aux Allemands d’informations capitales (Léon Schirmann).

Au terme du procès, le tribunal la reconnaît coupable d’intelligence avec l’ennemi et la condamne à être passée par les armes – d’autres femmes sont jugées et condamnées pour espionnage pendant les derniers mois de guerre : Augustine Josèphe, Susy Depsy, Régina Diano, etc.

 

 

 

 

 

L'exécution, 15. Octobre 1917 Au matin du 15 octobre 1917, à 6h15, sa grâce ayant été rejetée par le Président de la République Raymond Poincaré, Margaretha Zelle, ralliée au protestantisme depuis peu, est transférée en voiture cellulaire au polygone de Vincennes où l'attendent soldats et badauds. Mata Hari refuse qu'on lui bande les yeux. Onze balles et le coup de grâce asséné par un officier de cavalerie rassasient la vindicte populaire : "sa disparition réaffirmait l'autorité d'un pays rendu exsangue par une guerre meurtrière dont l'inutilité commençait à poindre" (J.-M. Loubier). Son corps, non réclamé, est mis à la disposition de l'institut médico-légal.
L’exécution, 15. Octobre 1917
Au matin du 15 octobre 1917, à 6h15, sa grâce ayant été rejetée par le Président de la République Raymond Poincaré, Margaretha Zelle, ralliée au protestantisme depuis peu, est transférée en voiture cellulaire au polygone de Vincennes où l’attendent soldats et badauds. Mata Hari refuse qu’on lui bande les yeux. Onze balles et le coup de grâce asséné par un officier de cavalerie rassasient la vindicte populaire : « sa disparition réaffirmait l’autorité d’un pays rendu exsangue par une guerre meurtrière dont l’inutilité commençait à poindre » (J.-M. Loubier). Son corps, non réclamé, est mis à la disposition de l’institut médico-légal.

PHOTOS ET CARTES POSTALES  DE L’ÉPOQUE

Mata Hari en 1910...photo colorisée.
Mata Hari en 1910…photo colorisée.
Photo colorisée de 1911.
Photo colorisée de 1911.
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Parfois devant le succès,les thèmes revenaient.
Parfois devant le succès,les thèmes revenaient.
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Une belle carte postale de l'époque.
Une belle carte postale de l’époque.
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