Un réaménagement des planètes extérieures du Système solaire se serait déroulé au cours des premiers stades de sa formation, montre l’étude de deux astéroïdes troyens de Jupiter.
Explications:
L’astrophysicien américain David Nesvorny et ses collègues du Southwest Research Institute ont étudié une paire rare d’astéroïdes nommés Patroclus et Menoetius, qui se trouvent à peu près à la même distance du Soleil que Jupiter, l’un en orbite devant et l’autre derrière la géante gazeuse.
Ces astéroïdes seront l’objet d’étude de la mission Lucy de la NASA qui doit être lancée en 2021. Ils seraient, selon les chercheurs, des vestiges du matériau primordial qui a mené à la formation des planètes extérieures (Saturne, Jupiter, Neptune Uranus).
Ils seraient ainsi les témoins de la naissance du système solaire il y a plus de 4 milliards d’années.
Patroclus et Menoetius possèdent une largeur d’environ 113 kilomètres et orbitent l’un autour de l’autre alors qu’ils tournent autour du Soleil.
C’est le seul système binaire connu dans la population d’astéroïdes troyens de Jupiter. En astronomie, le terme « troyen » est utilisé pour désigner un petit objet qui partage une relation avec deux autres corps plus gros.
De précédents travaux ont montré que :
- la distribution des orbites des objets transneptuniens fournit des preuves solides d’une migration de Neptune;
- les orbites des planètes extérieures sont devenues instables au début de la création du Système solaire;
- Jupiter aurait été frappée par une planète du type Neptune;
- l’orbite de Jupiter se serait alors rapprochée du Soleil.
Réaménagement planétaire
Les travaux actuels montrent que la présence des objets Patroclus et Menoetius, mais aussi des autres qui se trouvent dans l’orbite de Jupiter, serait le résultat d’un réarrangement planétaire précoce dans notre système.
Le couple Patroclus-Menoetius se serait formé à partir du disque initial de matière au-delà de Neptune, alors que la probabilité que des collisions lui arrachent des composants était grande.
Les simulations laissent à penser que de la présence du couple céleste aujourd’hui à cet endroit indique que l’instabilité dynamique entre les planètes géantes a dû se produire dans la première tranche de 100 millions d’années de la formation du Système solaire.
Ces objets ont probablement été capturés au cours d’une période dramatique d’instabilité dynamique lors d’un accrochage entre les planètes géantes du Système solaire.
Ajustement planétaire
Ce grand bouleversement aurait poussé Uranus et Neptune vers l’extérieur, où ils ont rencontré une grande population de petits corps qui seraient à l’origine des objets actuels de la ceinture de Kuiper, qui orbitent à la limite du Système solaire.
Selon les chercheurs, plusieurs petits corps de cette ceinture primordiale de Kuiper ont été dispersés vers l’intérieur, et certains d’entre eux sont devenus des astéroïdes troyens.
Des simulations récentes de la formation des petits corps laissent à penser que les systèmes binaires comme Patroclus-Menoetius seraient des restes des tout premiers moments de la naissance du système.
Les observations actuelles de la ceinture de Kuiper montrent que ces systèmes binaires devaient être courants lors de la genèse du système.
William Bottke
« Il n’en reste actuellement que quelques-uns dans l’orbite de Neptune. La question est de savoir comment ils ont survécu jusqu’à aujourd’hui », explique le chercheur William Bottke.
Et les planètes rocheuses?
Le modèle dynamique d’instabilité précoce du Système solaire mis de l’avant dans les présents travaux a aussi des conséquences importantes pour les planètes terrestres, en particulier en ce qui concerne l’origine des grands cratères d’impact sur la Lune, Mercure et Mars, qui se sont formés il y a environ 4 milliards d’années.
Selon ce modèle, les météorites qui ont creusé ces cratères sont moins susceptibles de parvenir des régions extérieures du Système solaire. Cela pourrait signifier qu’elles ont été fabriquées par des restes de petits corps du processus de formation des planètes rocheuses.
Le détail de ces travaux est publié dans la revue Nature Astronomy (en anglais).
En mai dernier, des scientifiques avançaient qu’une immense planète se trouverait aux confins de notre Système solaire.