L’étau se resserre autour du Parti libéral “corrompu” du Québec:L’UPAC vise haut

UPAC normandeau

 

L’enquête de l’Unité permanente anticorruption (UPAC) sur le financement illégal au PLQ sous Jean Charest vise très haut. Nathalie Normandeau (vice-première ministre), Violette Trépanier (responsable du financement), Robert Parent (directeur général) et Marc Bibeau (grand argentier bénévole) font partie des 11 sujets d’intérêt pour la police.

Des fonctionnaires et des élus provinciaux, dont Mme Normandeau, sont visés par cette enquête, révèlent des nouveaux documents judiciaires obtenus par un consortium de médias, dont fait partie Le Devoir.

Les policiers s’intéressent à un «système de corruption et de collusion» qui aurait permis au PLQ de faire le plein de contributions illégales, grâce à la générosité de firmes de génie de conseil et d’entrepreneurs passés maîtres dans l’utilisation de prête-noms. «Par ce stratagème, les entreprises contournent la loi électorale et réussissent à financer le Parti libéral», explique l’enquêteur Yanick Côté dans une déclaration assermentée. Cette déclaration, qui ne constitue pas de la preuve, a été produite en cour afin de convaincre un juge d’autoriser les perquisitions au PLQ, en juillet dernier.

Le financement sectoriel, sous la responsabilité de Violette Trépanier, était si commun qu’il portait un surnom: le «comté 127». Les fonds amassés allaient dans les coffres du parti, et non aux circonscriptions, a confié aux policiers l’ancien directeur général du PLQ, Robert Parent.

Mme Trépanier travaillait «en tandem» avec un administrateur de Schokbéton, Marc Bibeau, selon une déclaration de l’ancien directeur général du PLQ, Joël Gauthier. M. Bibeau, un bénévole, possédait un réseau de contacts étendus pour aider le parti à rencontrer ses objectifs de financement élevés (chaque ministre devait rapporter 100 000 $ par année).

Les donateurs corporatifs s’attendaient à un retour d’ascenseur, sous la forme d’un contrôle sur certains contrats publics. Un entrepreneur, non identifié, aurait ainsi contrôlé le processus d’octroi de certains contrats.

De 2005 à 2009, les actes criminels suivants auraient été commis: abus de confiance, complot, fraude, production de faux documents, fraude envers le gouvernement et contribution d’un entrepreneur à une caisse électorale. Aucune accusation n’a été portée dans cette affaire pour le moment.

Encore Boisbriand

Lorsque les policiers ont mené des perquisitions au siège social du Parti libéral du Québec (PLQ), en juillet dernier, ils cherchaient à mettre la main sur plusieurs informations: fichiers de donateurs pour la période 2005 à 2009, liste et calendriers, etc. Ils cherchaient aussi toutes les informations possibles sur les activités et les objectifs de financement de Nathalie Normandeau, de même que les correspondances entre Violette Trépanier, Marc Bibeau et Robert Parent.

Une bonne partie de l’enquête porte sur des irrégularités dans l’octroi d’une subvention de 11 millions de dollars pour l’agrandissement de l’usine de traitement des eaux de Boisbriand. Les travaux ont été exécutés par la firme de génie conseil Roche et Infrabec, propriété de Lino Zambito.

L’ex-ministre des Affaires municipales, Nathalie Normandeau, aurait contourné les règles afin d’accorder la subvention convoitée par la mairesse de Boisbriand, Sylvie Berniquez Saint-Jean, qui a récemment reconnu sa culpabilité à des accusations de fraude dans cette affaire.

Mme Normandeau aurait ignoré de nombreux avis défavorables des fonctionnaires du ministère des Affaires municipales. En effet, le ministère n’acceptait pas d’accorder deux subventions pour la même usine.

La décision de Mme Normandeau a avantagé deux firmes qui ont participé activement à son financement: Roche et Infrabec.

«L’octroi de la subvention par le MAMROT est le résultat d’un financement politique soutenu depuis 2005 et d’un exercice d’influence politique par différents intervenants auprès de la ministre Nathalie Normandeau et du Parti libéral du Québec», peut-on lire dans la déclaration de l’enquêteur Côté.

Deux vice-présidents de Roche (France Michaud et Marc-Yvan Côté) et Lino Zambito ont organisé des cocktails de financement pour la ministre. Grâce à un mélange de financement et de petites attentions, comme des billets de spectacles à la ministre, ils ont pu «garder de bons liens» avec Mme Normandeau, son entourage et le PLQ.

Les policiers ont obtenu la collaboration de témoins importants. Une adjointe administrative leur a remis l’agenda de la ministre. Un ancien chef de cabinet a déclaré que Mme Normandeau était «consciente» que France Michaud et Lino Zambito, faisait de la sollicitation pour ses activités.

Deux ex-employés de Roche, Stéphan Doré et Gilles Cloutier (témoin vedette de la commission Charbonneau) ont fait un lien entre l’octroi de la subvention à Boisbriand et l’implication de Roche dans le financement du PLQ.

Source: Adam Lord ,