C’était hier:Il y a 100 ans décédait Georges Feydeau (1862 – 1921)

Vlan ! Chez Feydeau, les comédiens doivent faire du bruit ! Disparu il y a tout juste un siècle, le maître du « théâtre des portes qui claquent » n’a cessé de séduire avec ses histoires d’amants dans le placard, donnant au vaudeville ses lettres de noblesse.

Georges Feydeau

 

Allons à la rencontre de ce maître du rire qui vécut entouré de dizaines de personnages en pleine scène de ménage.

 

Caricature de 1908 sur la pièce de théatre « Amélie »

Le mari, la femme, l’amant…

Le 8 décembre 1862 nait à Paris un petit Georges, chez Ernest et Léocadie Feydeau. Une belle histoire d’amour… sauf que tout semble indiquer que le cher enfant n’est en rien le fils de son père officiel.

Les mauvaises langues vont même jusqu’à désigner un géniteur, et pas n’importe lequel : le duc de Morny, voire son demi-frère, l’empereur Napoléon III lui-même…

Qu’importe ! « Bébé » grandit au milieu du milieu intellectuel de l’époque et c’est donc tout naturellement qu’à neuf ans seulement il écrit sa première pièce. Mais l’époque dorée de l’enfance s’arrête en 1869 lorsque son père est victime d’une hémiplégie avant de mourir, en 1873.

Scène du Système Ribadier parue dans le Monde Illustré en 1892

 

 

Ça promet !

Plongé dans des études médiocres, le jeune garçon n’a qu’une passion : le théâtre. Après quelques monologues, il crée en 1882 sa première pièce en un acte et deux personnages, Par la fenêtre.

Il faut maintenant élargir le public : ce sera fait en janvier 1883 avec Amour et piano, un vaudeville, bien sûr. Mais l’administration ne l’entendait pas de cette oreille : en novembre 1874, Feydeau tire un « mauvais numéro » et se voit incorporé dans l’infanterie, à Rouen. Sa nouvelle mission de « technicien des brancards » lui laissant beaucoup de loisir, il en profite pour s’encanailler à Paris avant de devenir secrétaire du théâtre de la Renaissance.

On commence à parler des bons mots de ce jeune homme qui écrit pièce sur pièce. La période est cependant difficile puisqu’il peine à maintenir un niveau de vie bourgeois pour sa femme et sa petite fille.  

Représentation de la Dame de chez Maxim,en 1913.

 

 

À la queue leu leu

En cette année 1892, la situation est grave pour Feydeau : 11 de ses comédies sur 12 ont échoué, et il vient d’avoir un second enfant. C’est donc son va-tout qu’il joue avec Monsieur chasse ! Bingo ! Dans les années suivantes, il enchaîne joyeusement les comédies à succès : Le Système Ribadier en 1892, L’Hôtel du Libre Échange et Un Fil à la patte en 1894, Le Dindon en 1896.

Il y gagne une Légion d’honneur, quelques maîtresses supplémentaires et de nouveaux amis qui sont là pour applaudir le triomphe, en 1899, de La Dame de chez Maxim’sLa Puce à l’oreille, créée en 1907, ne pourra faire mieux, victime de la mort d’un de ses comédiens.

La méthode Feydeau

« Une pièce ne se fait pas comme une paire de souliers » aimait à répéter le maître. Pour trouver des sources d’inspiration, il aimait s’asseoir dans un coin de restaurant ou à une table de la bonne société. Puis il laissait vagabonder son imagination pendant des semaines, voire des années, se refusant jusqu’au dernier moment à élaborer un scénario. Aidé à l’occasion par un peu de cocaïne, il parvenait à créer des œuvres au cordeau, poussant la minutie à détailler les décors au centimètre près. Ainsi sont nés des chefs-d’œuvre de la comédie sous la plume d’un homme qui disait pourtant faire partie des rabat-joie : « Ne vous étonnez pas si je suis triste. Telle est, en effet, ma disposition habituelle. Je ne ressemble point à mes pièces, que l’on s’accorde à trouver réjouissantes. Je suis mauvais juge en ces matières, je ne ris jamais au théâtre » (interview au Figaro, 1900) !

Réveillon au Café de Paris ,en 1904.

 

Terminus, tout le monde descend !

Si Occupe-toi d’Amélie en 1908 et On purge bébé en 1910 finissent de prouver, s’il en est besoin, le talent d’écrivain de Feydeau, on ne peut pas dire que l’auteur en retire une véritable tranquillité d’esprit.

Amoureux des belles choses, il est obligé en 1901 de mettre aux enchères une partie de sa magnifique collection de peintures, et ne supporte plus la vie de famille… Direction l’hôtel Terminus ! S’inspirant d’une drôle de manie de son ex-épouse, il y rédige Mais n’te promène donc pas toute nue (1911).

Mais il n’aura pas le temps de relancer sa carrière puisque la syphilis commence à provoquer chez lui des troubles psychiatriques qui obligent ses enfants à l’interner à Rueil-Maison. C’est là qu’il meurt, deux ans plus tard, le 5 juin 1921.

Ciel ! Mon mari !

Retrouvez à travers ces quelques répliques le fameux sens de la formule de Feydeau…
– «  Je ne te connaissais pas ; et crac, du jour au lendemain, parce qu’il y avait un gros monsieur en ceinture tricolore devant nous à qui on avait dit “oui“, c’était admis ! Tu me voyais toute nue. Eh ! Bien, ça, c’est indécent » (Mais n’te promène donc pas toute nue !).
– « Dans n’importe quel ménage, quand il y a deux hommes, c’est toujours le mari qui est le plus laid » (Un Fil à la patte).
– « Je suis très embêtée, je crois que je suis grosse… Comme tu es imprudent ! Je vais être obligée de te tromper avec mon mari ! » (Je ne Trompe pas mon mari).
– « Si les maris pouvaient laisser leurs femmes avoir un ou deux amants pour leur permettre de comparer, il y aurait plus de femmes fidèles ! » (La Main passe).
– « Les maris des femmes qui nous plaisent sont toujours des imbéciles ! » (Le Dindon).
– « Qu’est-ce que ça prouve, le mari ! Tout le monde peut être mari ! Il suffit d’être agréé par la famille… et d’avoir été admis au conseil de révision ! On ne demande que des aptitudes comme pour être employé de ministère, chef de contentieux. Tandis que pour l’amant, il faut l’au-delà. Il faut la flamme ! C’est l’artiste de l’amour. Le mari n’en est que le rond-de-cuir » (Le Dindon).
– « Quel dommage qu’on ne puisse pas avoir un amant sans tromper son mari ! » (La Main passe).

 

Représentation d’un fil à la patte de Georges Feydeau en 1894.

 

 

 

 

 

 

 

 

 


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Il y a 100 ans, la grippe espagnole faisait 1200 morts à Winnipeg

Le mois d’octobre marque les 100 ans du début de la pire épidémie de grippe espagnole à frapper le Manitoba. Le 30 septembre 1918, les soldats E. Murray et W. Barney débarquent dans la capitale manitobaine avec 21 autres soldats. Ils arrivent d’Europe où la Première Guerre mondiale en est à ses derniers jours à bord d’un train qui transporte des troupes vers le front sibérien. Ils souffrent de la grippe espagnole et en mourront quelques jours plus tard.

Il y a 100 ans, la grippe espagnole faisait 1200 morts à Winnipeg

Il s’agit des deux premiers décès enregistrés au Manitoba dus à cette maladie . La pandémie qui suivra fera 1200 morts à Winnipeg.

La pandémie déjà bien ancrée en Europe et dans l’est du Canada sera la plus meurtrière de la planète depuis la peste noire qui a tué environ 50 millions de personnes en Europe au 14e siècle.

Au Canada, la grippe espagnole a causé la mort d’environ 50 000 personnes, selon le site de Parcs Canada qui qualifie la situation de véritable chaos.

La professeure d’histoire à l’Université du Manitoba, Esyllt Jones, affirme qu’une telle pandémie serait toujours terrifiante aujourd’hui « si on imagine une épidémie qui tue plus de 1000 personnes en l’espace de peut-être trois mois ».

Des « poumons transformés en éponges »

D’après Esyllt Jones, la grippe espagnole présentait des symptômes similaires à ceux d’une grippe ordinaire, soit des douleurs et de la fièvre, qui pouvait toutefois être assez élevée pour provoquer des délires ou des pensées suicidaires.

Elle compare les poumons des personnes atteintes par le virus à des éponges. Ils s’emplissaient d’un liquide, ce qui entraînait une forme d’asphyxie. Elle explique que de nombreux malades sont morts d’infections secondaires liées à la maladie, comme des bronchites ou des pneumonies.

Dans son livre The Last Plague, l’historien Mark Humphries note que, malgré son nom, les chercheurs discutent encore de l’origine de la grippe « espagnole ». Elle a été nommée comme telle parce que les médias espagnols, qui n’étaient pas censurés, ont été les premiers à en rendre compte en mai 1918.

Mark Humphries estime qu’une fois que la grippe eut atteint l’est du Canada, le train du Corps expéditionnaire sibérien a contribué à son expansion à travers le pays. Esyllt Jones ajoute à cela les déplacements des civils. À Winnipeg, la première victime civile de la maladie était une femme qui revenait d’un voyage à Montréal.

Face à la propagation de la maladie, les fournisseurs de soins de santé étaient démunis, explique Esyllt Jones.

Une ville sous pression

Lorsque les soldats Murray et Barney sont morts à Winnipeg en 1918, la Ville n’était pas préparée à la virulence de cette vague de grippe espagnole.

« Rien de ce que nous avons connu dans le passé ne se rapproche de cette épidémie, tant au niveau de la rapidité de sa propagation que de sa virulence », peut-on lire dans le rapport annuel de santé de la Ville pour 1918.

Esyllt Jones explique que Winnipeg souffrait des difficultés causées par quatre années de guerre en Europe et était la plus grosse ville de l’Ouest canadien avec une population approchant les 180 000 habitants. Ayant connu plusieurs vagues d’immigration, elle faisait face à des tensions ethniques et sociales.

Des mesures de quarantaine inadéquates, le manque de coordination en matière de santé publique et une « impuissance » médicale ont créé une situation de tension. Le nombre de morts a atteint des centaines en quelques semaines et des mesures de santé publiques ont été mises en place.

Tous les rassemblements ont été interdits, tandis que les lieux comme les églises, les écoles et les bars ont été fermés. Cela n’a pas suffi. La maladie a atteint son apogée à la mi-novembre, avant de disparaître progressivement.

À l’époque, les bénévoles ont joué un rôle crucial. En 1918, il n’y avait pas de ministère de la Santé et Esyllt Jones explique que la plupart des tâches à effectuer à ce niveau relevaient des municipalités. À Winnipeg, au moins 650 femmes se sont portées volontaires pour aider les malades.

Un taux de mortalité 10 fois plus élevé dans les communautés autochtones

À Winnipeg, la grippe espagnole a tué environ 1200 personnes. Des recherches récentes au Manitoba établissent que le taux de mortalité au sein de certaines communautés autochtones était près de dix fois plus élevé qu’au sein des non-Autochtones.

D’après Esyllt Jones, c’est dû à l’héritage social et économique du colonialisme ainsi qu’au manque d’accès aux soins dans les régions plus éloignées.

« Si nous voulons comprendre l’expérience des Canadiens autochtones, nous devons accepter le fait que leur inégalité en matière de santé n’est pas une chose inévitable. C’est un résultat de l’histoire », affirme-t-elle.

Esyllt Jones explique que « les épidémies sont une occasion pour les divisions de s’enfoncer davantage ». « Mais ce sont aussi des occasions pour les gens ordinaires de s’entraider », souligne-t-elle.