Ras le bol des émissions de vedettes ,par Roméo Bouchard

Ras le bol des émissions de vedettes!

La fabrication des vedettes à l'aide des médias:une spécialité du néolibéralisme québécois...enveloppé dans le mensonge.
La fabrication des vedettes à l’aide des médias:une spécialité du néolibéralisme québécois…enveloppé dans le mensonge.

J’accuse les médias de sombrer dans le divertissement futile et le vedettariat. Ce n’est plus seulement une tendance, c’est devenu une calamité, une politique délibérée de désinformation, un détournement de démocratie, une autre stratégie de l’offensive des riches pour s’enrichir sans avoir les citoyens dans les jambes. La formule est vieille comme le monde : régner tranquillement, en offrant du pain et des jeux au petit peuple.

La plupart des émissions de télévision et même de radio, à part peut-être les bulletins d’information bien-pensants qu’on nous repasse en boucle du matin au soir, sont conçues désormais non plus en fonction de leur utilité ou de leur intérêt public, mais en fonction de leur coût et de leur rentabilité en cotes d’écoute, et donc, en publicité. Pour ce faire, on a recours aux artistes, humoristes et cuisiniers les plus populaires, et donc les plus « payants », on potine sur leur vie et leur travail, on les fait participer à des séances de jeux et de farces de plus en plus grossières et insignifiantes. Ça donne des émissions banales, animées par des vedettes, qui invitent d’autres artistes et humoristes et se parlent entre eux, et souvent tous ensemble, de tout et de rien.

Même des émissions qui avaient à l’origine un contenu ouvert, comme Tout le monde en parle, Pénélope, Les enfants de la télé, etc., sont atteintes de ce virus du divertissement à tout prix. Au retour de Pénélope, qui était à l’origine une émission de divertissement léger d’été, nous avons eu droit ces jours-ci à la couleur du rouge à lèvres de Véro, aux secrets du gazon de Charles Lafortune, aux choix de chemise d’Alex Perron, aux « bitchages » de Jean-Sébastien Girard et de Jean-René Dufort, et rien d’autre.

Le Québec, c’est plus que ce circuit fermé des artistes, des humoristes et des cuisiniers connus. Si brillants soient-ils, ils sont surexposés et finissent par n’avoir plus grand-chose à dire, si ce n’est figurer pour les cachets. Les pièces de théâtre, les spectacles, les entrevues d’auteurs ou de penseurs, le monde ordinaire, tout est disparu des écrans. Il n’y a plus que des vedettes.

Offre différente

Il y a pourtant des gens partout au Québec, même hors de Montréal, qui publient des livres remarquables, pas juste aux éditions de La Presse ou de Québecor, mais à Écosociété, à Lux, à Septentrion, à Atelier 10, aux Trois-Pistoles ; il y a des gens qui font, qui inventent des choses étonnantes et créent des projets magnifiques ; il y a des gens qui luttent pour sauver leur travail, leur village, leur vie, leur environnement ; il y a des gens qui ont des choses à dire et qui n’ont jamais accès aux médias nationaux ; il y a des drames humains et sociaux dont on ne parle jamais. La vision du Québec et du monde que projettent ces médias est de plus en plus hors de la réalité. C’est un détournement de conscience, de fonds et de moyens lourds de conséquences. On est loin des leçons de politique de René Lévesque à Point de mire, des grandes entrevues de Fernand Séguin au Sel de la semaine, des grands questionnaires de Raymond Charette à Tous pour un, des télé-théâtres de Marcel Dubé aux Beaux dimanches, des émissions dont on se souvient encore cinquante ans plus tard.

Pour les gens de Montréal, pour la jeune génération surtout, c’est peut-être un moindre mal, car la télévision généraliste et la télévision en général sont de plus en plus remplacées par diverses plateformes numériques et par le foisonnement culturel et politique de la grande ville. Mais pour les plus âgés et pour les gens des régions éloignées, ces options ne sont guère accessibles, et les gens y sont captifs de ce lavage de cerveau abrutissant et aliénant.

Les médias d’information ont une grande responsabilité : ils sont un outil essentiel pour une vie démocratique en santé. Présentement, ils sont devenus une drogue empoisonnée qui nous détourne de notre réalité et nous enferme dans l’insignifiance et l’inaction. Quelqu’un pourrait-il dire aux responsables que nous en avons ras le bol de ces émissions de vedettes médiocres et mercantiles ?

Auteur:Roméo Bouchard

2 commentaires sur “Ras le bol des émissions de vedettes ,par Roméo Bouchard

  1. Roméo est aussi une vedette, beaucoup de gens le lisent partout où l’on publie ce qu’il écrit. Le Devoir publie régulièrement ses opinions et il a beaucoup d’abonnés sur facebook où il publie librement plusieurs opinions qui sont partagées par ses abonnés. Je remarque que Roméo Bouchard a des idées bien arrêtées à propos de la politique et à titre de sociologue Roméo a des vues précises quant à l’évolution. C’est un pacifiste, un démocrate, un ami de l’équité et ses engagements personnels vont dans le sens de ses références dont l’une l’a poussé vers son combat pour une constituante à la Étienne Chouard.

    Tout ça me plaisait bien et je me suis mis à le suivre sur facebook. Je lisais aussi les commentaires laissés par ses lecteurs dont 90 % l’encensait. Mais de temps en temps certains tentent maladroitement de désarmer son discours sans y parvenir car il n’ont pas l’étoffe de cet intellectuel. Par contre lorsque quelqu’un argumentait sur des sujets avec un peu plus d’arguments et de verve, je voyais Roméo se braquer, faire des procès d’intention, prendre des raccourcis afin de tenter de diminuer l’autre au lieu de débattre amicalement.

    Tout comme ici il donne une charge contre la télé qui a bien changée et il explique sa nostalgie des beaux dimanches et du théâtre de Marcel Dubé. Mais qu’en est-il exactement ? Depuis les années soixante où l’éducation est devenue plus accessible mais sans que la valorisation de l’instruction ne vienne stimuler les jeunes à poursuivre des études plus loin que le secondaire.

    Monsieur Bouchard vient d’une époque et d’un milieu où l’instruction voulait encore dire quelque chose. Malheureusement, ce n’est pas le lot de la jeunesse actuelle. La jeunesse des années soixante s’est rangée et le balancier est revenu vers la droite et le matérialisme sauvage. Faudra qu’il se rende au bout de sa course avant de revenir vers un sens commun plus acceptable, moins mercantile et surtout moins intolérant. Le point de rupture s’en vient et le balancier n’aura d’autre choix que de revenir vers la gauche, mais cela risque de prendre encore un peu de temps, car la discussion, l’échange et le partage a perdu de sa convivialité …

    Sans rancune et en toute objectivité, on ne peut pas être toujours d’accord avec les ambitions et les rêves de nos contemporains, ce n’est pas une raison pour les ignorer.

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